samedi 27 avril 2019

La sorcière sans sourire

La peste avait laissé traîner ses longs cheveux noirs de plaies sur toute l'année, personne n'y avait échappé. Pas les riches et surtout pas les pauvres. On pouvait encore voir les disparus de sa chevelure quand elle se promenait les nuits où la lune dévorait d'éclat le monde.

Ce fut lors d'une telle soirée, que la sorcière arriva. L'apercevant, l'apôtre de la mort infecte, pointa un doigt comme un barreau d'une cage ivoire vers l'arrivante. Tout en souriant, elle l'invitait du geste à se prélasser dans son long sillage de silence. L'invitation reçut un crachat et un refus, symbolisé par un autre type de geste du doigt.

Dans le village, une maison attendait, un pot de suie appelait timidement la praticienne, seule lueur dans un bourg en deuil.

Toc toc toc

Sans attendre de réponse elle entra. Un chat vint la caresser amicalement et quatre paires d'yeux s'allumèrent dans la pénombre. Les enfants se frottèrent les paupières en baillant et les parents s'activèrent tranquillement à allumer la pièce. De son sac, la sorcière sorti ses décoctions de magie azur et de magie rouge et verte. Les enfants assis dans un coin confortable, regardaient leurs parents s’émerveiller devant les mains de la magicienne et les imitaient sans trop savoir.

De la poudre illuminée venait en rencontrer d'autres, des joyaux liquides coulaient en gargouillements visqueux. Avec la saveur glaçante de la nuit, elle façonnait un chant de feu et de douceur qui emplissait la gorge et le nez. Pendant un moment, les parent murmurèrent à la sorcière qui avait arrêter de jouer, mais les quelques paroles ne purent être entendus par les deux garçons assourdis par le sommeil.
Enfin, le four s'ouvrit, libérant un crescendo inattendu de tiède tendresse. La mère et le père prirent chacun un petit sur leurs genoux, la table avait été disposé simplement mais exceptionnellement. Au milieu, trônait un seul plat, une colonne plate de céramique aux multiples losanges de porcelaine molle, blanche perle et carmin et or, sur laquelle se tenait une seule fleur plus belle que le saphir et à la beauté translucide.

Immédiatement, la sorcière s'en alla sous les larmes heureuses des parents et la joie des enfants, elle, n'avait pas bronché de toute sa nouvelle vie. Son sourire, il se trouvait maintenant sur leurs tables à eux, à tous. Bientôt, l'obscurité la perdit à leurs yeux.

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